L’échographie clinique en médecine générale : freins à sa diffusion et leviers de formation
Strasbourg, 6 juin 2025
L’échographie clinique s’impose peu à peu comme un prolongement de l’examen physique. Elle permet au médecin généraliste de mieux orienter son diagnostic, de gagner en autonomie et de réduire certains recours inutiles à la radiologie. Pourtant, en France, son adoption reste lente, à l’inverse d’autres pays européens. Quels sont les freins à cette diffusion ? Et comment la formation peut-elle devenir un levier d’appropriation durable ?
Des freins multiples à l’intégration de l’échographie clinique
Un cadre réglementaire et financier flou
En France, l’échographie clinique n’est pas clairement encadrée ni valorisée dans la nomenclature.
Elle n’est pas systématiquement reconnue comme une compétence du médecin généraliste, ce qui limite son intégration dans la pratique quotidienne.
Des freins économiques et organisationnels
Même si les appareils sont devenus plus abordables, leur coût reste un frein pour de nombreux cabinets.
Par ailleurs, le temps nécessaire pour intégrer l’échographie à une consultation standard n’est pas toujours compatible avec le rythme de travail des généralistes.
Un manque de formation initiale et continue
Le principal obstacle reste l’absence de formation structurée. La majorité des médecins généralistes n’ont pas été formés à l’échographie durant leurs études, et les offres de formation continue sont souvent ponctuelles, non certifiantes ou inadaptées au contexte de la médecine de ville. Comme le souligne le poster présenté au Congrès de la Médecine Générale France 2025
« L’absence de formation universitaire obligatoire en échographie clinique est perçue comme un frein majeur par les praticiens interrogés » (Feraudet et al., 2025).
Des usages bien plus répandus ailleurs en Europe
Plusieurs pays européens ont franchi des étapes importantes dans la démocratisation de l’échographie clinique :
Suisse : Plus de 50 % des médecins généralistes utilisent l’échographie au quotidien, grâce à une offre de formation reconnue et une culture d’usage bien établie (Kuhn et al., 2020).
Allemagne : La formation est intégrée au cursus médical, avec des actes échographiques valorisés financièrement.
Danemark : L’échographie clinique est enseignée en stage et utilisée par près d’un tiers des généralistes.
Espagne : Des efforts régionaux ont permis de mieux équiper les centres de santé, avec un intérêt croissant pour la formation sur site.
Ces modèles montrent qu’une politique cohérente, alliant formation, cadre réglementaire et soutien matériel, permet une adoption plus large et plus rapide.
Former à une échographie adaptée au soin primaire
L’échographie clinique ne vise pas à remplacer les examens radiologiques complets. Son intérêt repose sur des indications simples et fréquentes en médecine générale : rechercher une rétention urinaire, confirmer une image suspecte de cholécystite, repérer un épanchement pleural, etc.
Des formations hybrides, pratiques et ciblées
Pour être utile et sécurisée, cette pratique doit s’apprendre dans un cadre structuré, incluant :
des ateliers pratiques supervisés pour apprendre les bons gestes ;
des cas cliniques contextualisés pour développer le raisonnement ;
et des outils numériques complémentaires, adaptés au rythme et aux contraintes des médecins de terrain.
Plusieurs travaux soulignent que les médecins généralistes expriment un besoin fort pour des formations accessibles, concrètes, et intégrées à leur pratique.
Des initiatives récentes vont dans ce sens, en proposant des outils pédagogiques pratiques conçus par et pour les généralistes :
« La création de fiches pratiques standardisées, validées par consensus d’experts, vise à harmoniser les pratiques en échographie clinique ciblée en médecine générale » (Aubertin et al., 2025).
diSplay U/S : un simulateur innovant au service de l’apprentissage
Parmi les outils disponibles, le simulateur diSplay U/S offre une solution réaliste pour s’initier à l’échographie clinique sans matériel spécifique. Ce simulateur en ligne propose :
des cas cliniques sains et pathologiques interactifs fondés sur des situations concrètes ;
un entraînement progressif à la lecture et à l’analyse des images ;
un apprentissage pratique et une accessibilité totale, depuis n’importe quel ordinateur connecté.
Il permet aux médecins de s’exercer en totale autonomie, de renforcer leurs repères visuels et de gagner en confiance, avant même d’avoir accès à un échographe réel. Il s’agit d’un complément précieux aux formations présentielles, qui favorise une montée en compétence souple et progressive.
Conclusion
L’échographie clinique représente un outil précieux pour renforcer l’autonomie et la pertinence des soins en médecine générale. Son développement est freiné en France par un manque de formation structurée, une absence de reconnaissance officielle et des obstacles organisationnels. Pourtant, les expériences d’autres pays montrent qu’une stratégie volontariste — axée sur la formation, l’équipement et la reconnaissance — peut faire évoluer les pratiques.
Une étude menée en France en 2023 confirme l’impact concret de l’échographie clinique ciblée :
« L’échographie modifiait la prise en charge dans 88 % des cas, en influençant l’orientation diagnostique, la prescription d’imagerie ou l’initiation thérapeutique » (Feraudet et al., 2025).
Des outils innovants comme diSplay U/S ouvrent de nouvelles perspectives pour permettre aux médecins de se former de manière autonome et sécurisée. L’échographie clinique n’est pas un luxe technologique : elle peut devenir un pilier de la consultation moderne, à condition d’en faciliter l’accès.
Références
Société Nationale d’Echographie en Médecine Générale (SNECHO-MG) – Aubertin, L., Aujoulat, P., Bouquet, S., Buron, S., Chabardes, A., Chauvin, B., Cibois-Honnorat, I., Dambor, A., De Bandt, D., Hagiu, D.-P., Leboucher, O., & Skendi, M. (2025). Harmonisation de l’échographie clinique ciblée en médecine générale : Développement de fiches pratiques standardisées [Poster]. Congrès de la Médecine Générale France 2025.
https://posters.congresmg.fr/2025/pdf/57.pdfFeraudet, I., Liard, R., Ibanez, G., Juillet, C., Andersen, C., Bach, M., & Skendi, M. (2025). L’utilisation de l’échographie clinique ciblée par les médecins généralistes en 2023 et son rôle dans la prise en charge des patients [Poster]. Congrès de la Médecine Générale France 2025. https://posters.congresmg.fr/2025/pdf/39.pdf
Kuhn, A., & Dejours, C. (2020). Use of point-of-care ultrasound by general practitioners in Switzerland: a cross-sectional survey. BMC Family Practice, 21(1).
OMS (1998). L’échographie : Manuel d’utilisation à l’intention du personnel de santé dans les soins primaires. Genève.
Robert, A. (2023). L’échographie clinique ciblée : une extension de l’examen physique. Revue du Praticien.
Bornemann, P. et al. (2019). Assessment of primary care physicians’ use of ultrasonography as a decision-making tool. Annals of Family Medicine.